Yves Naudé, qui voulait mettre fin à ses jours, aurait provoqué l’explosion d’un immeuble à Dijon.
Voici mes dessins du procès Naudé, et les grandes lignes de l’affaire. Cour d’assises de Dijon, 5 jours d’audience.
Les faits remontent au 16 septembre 2016 : peu après 9h, une déflagration secoue le quartier de la gare. L’immeuble d’un étage où elle s’est produite est presque entièrement détruit. Autour, certains bâtiments menacent de s’effondrer. Parmi les blessés, deux le sont grièvement, dont l’accusé. Alors qu’il est retiré des décombres par les secours – certains parleront de « scène de guerre » – il indique de lui-même avoir ouvert des bouteilles de gaz et mis le feu pour mettre fin à ses jours.

Brûlé sur 20% du corps, le quinquagénaire est conduit dans un service pour grands brûlés à Metz. Il sera mis en examen quelques semaines plus tard et placé en détention provisoire. Interrogé lundi sur une déception sentimentale à l’origine de ses intentions suicidaires, l’accusé, retrouvé deux jours avant les faits avec des plaies aux poignets, reconnaît qu’il était très amoureux de sa voisine, avec qui il entretenait une relation amicale et qui l’avait éconduit à plusieurs reprises. « On avait décidé de laisser tomber ces histoires amoureuses, ce que je croyais pouvoir faire, mais ce n’était pas le cas », explique cet homme aux cheveux poivre et sel coupés ras, vêtu d’un t-shirt bleu. « D’un seul coup dans ma tête, il fallait que je meure, je ne sais pas pourquoi. » Devant les jurés, il dit avoir du mal à se souvenir des faits, la faute aux médicaments et à l’alcool qu’il avait consommés. Il parle de sa colère mais nie avoir menacé sa voisine.

Parmi la cinquantaine de parties civiles, une femme aujourd’hui âgée de 59 ans est la plus grièvement touchée. Elle se trouvait à Dijon pour raisons professionnelles et a dû être amputée d’une jambe après l’explosion. « Sa vie a basculé en une fraction de seconde. Elle veut comprendre comment un homme peut, par égoïsme, risquer d’attenter à la vie des autres », a indiqué son avocat, Jean-Philippe Morel. L’accusé risque 30 ans de réclusion criminelle pour « destruction du bien d’autrui par un moyen dangereux pour les personnes » ayant notamment entraîné « une mutilation ou une infirmité permanente ». (Texte : Cabinet MOREL )
M Christophe Aubertin demande 12 ans de réclusion criminelle.

Une charge d’ensemble qui joue sur le terrain émotionnel des jurés. L’avocat général Christophe Aubertin sera plus factuel dans sa démonstration. Sa conviction : Yves Naudé « était complètement déterminé » lorsqu’il a décidé de faire sauter l’immeuble. Déterminé et « totalement conscient des conséquences de son geste. Ce n’est pas un coup de folie, mais un projet nourri. Une semaine avant, il dit à un témoin : “Soit je me jette sous un train, soit je fais tout sauter” ». Il demande « une peine à la hauteur de la gravité des faits » qu’il estime à douze ans de réclusion criminelle.
» Il n’avait manifestement pas conscience des conséquences ! «

Me Aurélie Champenois, en défense, écarte intelligemment d’entrée la question des conséquences sur les victimes, sans les minimiser et en rappelant que « c’est bien lui qui a créé ces souffrances ». Mais autant les victimes ont pu « l’exprimer avec dignité », autant Yves Naudé a une personnalité qui ne lui permet pas de trouver le chemin vers les mots que les victimes voudraient entendre. « Il s’est livré à vous tel qu’il est, sans artifice de défense, sans user de la moindre ficelle. » . Me Champenois s’appuie largement sur les rapports et les précisions apportées à l’audience par les experts psychologue et psychiatre. « Avait-il conscience des conséquences de son geste ? Manifestement, non », affirme-t-elle. Aussi, les douze ans de réclusion demandés par l’avocat général lui semblent « disproportionnés ». Elle s’adresse aux jurés, leur rappelant qu’on ne « leur demande pas vengeance ».
Le verdict est tombé tard dans la soirée : Yves Naudé a été condamné à quinze ans de réclusion. (texte Bruno WALTER)
Dessins : ZZIIGG, toute reproduction interdite sans l’accord écrit de l’auteur. Photo : Christophe Gaillard France3.